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Jean Leloup Dôme

Jean Leloup, Le Dôme décortiqué
Année : 1996
Publié le 15 janvier 2021
Vues 3,800
Republié le 10 janvier 2023

 

Ricardo Langlois

Je vous raconte Leloup. Qui est-il? Que représente-t-il ? Son œuvre, sa poésie, sa bipolarité. D’abord L’Amour est sans pitié sorti en 1991 n’était pas un album important pour moi, peut-être à cause de Richard Séguin et surtout du mouvement grunge.

J’étais à la radio en 1991. C’est 1990 la grosse toune, la grosse affaire. Le narrateur qui se questionne sur la guerre du Golfe. Tout en subtilité : Heureusement que ma copine a soudain l’idée de génie de me toucher le porte-avion vite fait, je lui sors mon canon. La métaphore ne trompe pas dans l’oreille d’un sourd. L’Orgasme c’est bien de ça qu’il s’agit. Et la drogue ? Leloup en parle abondamment : héroïne, héroïnomane, ecstasy, absinthe, poudre de riz. L’amour est sans pitié, c’est la transgression. C’est la fleur de l’être. Pas de limite, jeune hippie qui flirte avec l’air du temps. Pas de politique. Pas de religion. L’obsession entre un joint et la lumière sombre d’avoir 30 ans. Bientôt il y aura une autre métamorphose.

1996

C’est en 1996 que je deviendrai un vrai fan de Leloup. L’album Le Dôme , je l’écoutais alors que j’étais sur les bancs de l’UQAM. Personne dans les partys n’a pensé à Leloup. C’était The Cure, Nirvana, Depeche Mode, Pearl Jam qui jouaient dans des partys improvisés.

On m’invitait tout le temps. Juste du beau monde allumé qui lisait du René Char, La capitale de la douleur (Éluard). Mon voisin d’à côté aimait Pink Floyd et Rush… Des jeunes allumés avec le cœur gros comme le soleil. Moi, j’écrivais sur Saint-Denys Garneau et Anne Hébert, c’était un devoir de parler de nos poètes québécois. C’est comme en 1995, l’année du Référendum, l’effondrement d’un idéal. L’idée juste et normale d’avoir un pays beau et grand. Notre beau Québec. Dédé Fortin s’est effondré littéralement. Comme lui, j’ai trouvé ça difficile. Presqu’en même temps que Leloup, Mes Aïeux et Loco Locass s’inscrivent dans les nouvelles recrues. Et Jean Leloup débarque avec son merveilleux foutoir (journal Voir). Ce gigantesque tournesol, sur la pochette, attire mon regard. C’est comme Si on avait besoin d’une cinquième saison d’Harmonium. La nature, la campagne, les fleurs. C’est une référence à Andy Warhol, du pop Art. Après un séjour à New York, on reste habité. Laboratoire esthétique, le East Village, The Dome est un night club. Leloup se veut psychédélique. Il dira en entrevue dans le Voir que cet album est un greatest hits. Dans le Voir (toujours) on le définit comme méchant trip de drogue.

14 chansons

Le monde est à pleurer, premier extrait radio, dure sept minutes. (Comme Hotel California il me semble). Ce qui est remarquable et innovateur, c’est la grande diversité musicale. Il a composé seulement trois pièces sur l’album : La chambre, Sang d’encre et I lost my Baby. Onze des quatorze chansons sont issues de multiples collaborations. Un laboratoire musical.

Tout ça est proche d’un proverbe bouddhiste : Écrire comme vivre, sachant que l’hiver finira par tout couvrir au crayon blanc.

Leloup et le Grunge

Le sampling, le loops, le scratching c’est aussi tout ça dans Johnny Go avec un flow particulier. Plus loin, Sara avec la guitare saturée et les percussions. Tout est amplifié. Une intonation presque gutturale et brouillée presque noise.

Leloup est influencé par la culture grunge. La guitare est omniprésente et on va même jusqu’à dire (toujours dans le Voir), une mélodie vaguement ‘doorsienne’ (Hein, Jim Morrison?) Le personnage songeur, étendu sur le lit. Tout est là, (la mise en scène de mon adolescence). Je suis couché dans l’herbe tendre et je rêvasse reconnaissant devant moi À feu et à sang (Faire des enfants).

Jean Leloup est fantaisiste, surréaliste. Dans Sara (j’y reviens), le lexique est impressionnant : lapins, abeilles, chasseurs, ovni, Alice aux pays des merveilles. Même l’espèce humaine n’y échappe pas : la violence, le mal, la cruauté, la bêtise humaine. C’est assez proche de Cobain, ça, non. Des métaphores sur l’acte sexuel. C’est la vie. Leloup se bat pour vivre. Comprendre le mouvement de l’oiseau et de la pluie. Ce que l’on retrouve vaut moins que ce que l’on cherche. Le cycle de la Vie c’est aussi le cycle de la Douleur.

Abracadabra!!

Dieu doit être laid pour avoir créé tant de beauté. Quand j’ai écouté Le Dôme, dans ma tète, je le vois juste en- dessous de Fiori. Un idéaliste qui se bat avec des images, des concepts : la souffrance, le temps qui passe. La Vie est un chant au divin. Jouir de la vie, de la musique.

Mettre des mots sur des maux. La rage d’être celui qui nous guérit par sa musique. 1996 c’est Le Dôme, l’album que j’ai le plus écouté. Une boite à surprises. Leloup est complexe comme personnage comme Fiori. Il sort un album et il disparait. Abracadabra!!

Pigeon

Je termine cette analyse personnelle sur Pigeon. C’est sa préférée sur l’album. Une chanson qui ne jouera jamais à la radio. Une fable mais aussi une chanson très personnelle (presque autobiographique). Ça résonne en soi comme du Harmonium.

Un vieux pigeon de trente ans Fumait un jour son pétard
En pensant à sa guitare D’un coup d’aile il se décide À aller parler au roi
C’est un vieil écureuil blanc Gras comme un pigeon de lait
Le pigeon fait sa requête Quelques frites à volonté
Un petit coin bien tranquille Il veut finir en beauté

Notes
1. Plusieurs citations du journal Voir ainsi que le paragraphe Leloup et le grunge proviennent du livre Jean Leloup, Le principe de la mygale de Nadia Murray.
2. Les notes, la comparaison avec Serge Fiori, les états d’âme sont cités dans mon journal personnel (année 1996). Jean Leloup et sa bipolarité, cité dans la revue L’Itinéraire, mars 2015.

Ricardo Langlois est poète et critique littéraire sur lametropole.com. Son 3e recueil Septième Ciel est disponible.
(Septième ciel, 60 pages, 5 illustrations 12$ argent ou chèque (écrivez lui en privé).

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